De la compassion à l’exécution: une voie pratique vers la quasi-élimination de l’itinérance à Montréal

Joseph Farag
From Compassion to Execution: A Practical Path Toward

Le 12 novembre 2025, La Presse a publié une entrevue qui m’a profondément marqué — non pas parce qu’elle était émotive, mais parce qu’elle était claire, pragmatique et ancrée dans la réalité.

La discussion autour de l’itinérance se bloque trop souvent entre de bonnes intentions et des frictions institutionnelles. Ce qui ressortait de cette entrevue, c’était la volonté de dire tout haut ce que l’on dit habituellement tout bas :

« Il faut que je me donne les moyens d’agir. »

« La responsabilité de l’itinérance doit être beaucoup plus partagée. »

« Si je veux acheter 1 000 sacs de couchage, je ne peux pas… il faut simplifier les gestes rapides. »

Ce ne sont pas des prises de position idéologiques.
Ce sont des vérités opérationnelles.

L’itinérance n’est pas un problème mystérieux.
C’est un problème de communication et de coordination.

 

Qu’est-ce qui fait de moi un expert ?

Je ne suis pas un expert.

Je suis un résolveur de problèmes naturel — et, à un moment de ma vie, une personne très chanceuse.

En 2010, après avoir vécu dans ma voiture, j’ai moi-même connu brièvement l’itinérance. Ce qui m’a permis de me remettre sur pied n’était ni la brillance ni la planification — c’était une combinaison de persévérance, de timing et d’accès à un programme d’aide sociale autorisé par le gouvernement, malgré des années d’impôts manquantes à l’époque.

C’était, littéralement, de la chance.

Sans ce coup de pouce, je ne sais pas si j’aurais eu l’occasion de rassembler les morceaux de ma vie. Cette expérience a façonné de manière permanente ma façon de voir la vie — et de comprendre les problèmes auxquels nous faisons face, individuellement et collectivement.

 

Alors pourquoi Montréal — et pourquoi en faire un exemple ?

Lorsque j’ai commencé à reconstruire ma vie, j’ai porté une attention particulière à la façon dont les gens se relevaient après des revers majeurs. Fidèle à mon instinct entrepreneurial, j’ai étudié les propriétaires d’entreprise en particulier.

Chaque personne que j’ai observée partageait un même schéma.

Ils n’attendaient pas des conditions parfaites. Ils prenaient ce qui existait déjà — des systèmes imparfaits, incomplets, parfois injustes — et faisaient ce que d’autres n’étaient pas prêts à faire. Dès le départ, ils formulaient le défi autrement et abordaient leurs problèmes sous un angle nouveau.

  • Ils transformaient les contraintes en levier
  • Le levier en direction
  • La direction en désir profond

Voir ce schéma se répéter encore et encore ne m’a pas seulement donné de l’espoir — cela a reprogrammé ma façon de comprendre les problèmes.

Et si, collectivement, nous choisissions de voir ce défi autrement — non pas comme un fardeau immuable, mais comme une grande opportunité : celle de réorganiser ce qui existe déjà et de bâtir quelque chose qui n’a jamais été fait.

Tant que l’itinérance sera perçue uniquement comme un fardeau sociétal, nous ne mobiliserons jamais pleinement le secteur privé. Et sans le secteur privé, nous ne pouvons pas nous rassembler, comme société, autour d’un objectif commun — l’enjeu reste prisonnier des cycles politiques.

Mais si nous l’abordons à partir du terrain, avec transparence, rapidité et exécution mesurable — et si nous la concevons intentionnellement comme un modèle digne d’être étudié — nous pouvons mobiliser bien plus que les seules institutions publiques.

Montréal possède déjà ce je ne sais quoi qui résonne à l’échelle mondiale.
Nous devrions l’exploiter — non pas symboliquement, mais structurellement.

C’est pourquoi cet enjeu me tient à cœur depuis plus de 15 ans — non pas comme une cause abstraite, mais comme l’échec vécu et récurrent de systèmes trop lents, trop fragmentés et trop réfractaires au risque pour répondre à un problème de société qui nous concerne tous.

 

Un projet pilote pratique :

Montréal — Itinérance quasi nulle

Si nous voulons réellement progresser, nous devons cesser de demander « Qui est responsable ? » et commencer à demander « Qu’est-ce qui fonctionnerait — rapidement, de façon mesurable et transparente ? »

Ce qui suit est un modèle pilote concis, axé sur l’exécution, conçu pour ouvrir une conversation sérieuse et pratique avec les décideurs et les architectes des systèmes déjà en place aujourd’hui.

 

1 / Commencer par une mission claire

Traiter l’itinérance comme un problème solvable, et non perpétuel.

Concevoir un projet pilote dont l’unique objectif est de démontrer que le quasi-zéro est possible.

 

2 / Une petite délégation agile (5 personnes)

Déjà actives dans l’écosystème :

  • Représentant du bureau du maire
  • Journaliste (pour la transparence et la reddition de comptes)
  • Expert juridique
  • Responsable des communications / marketing
  • Spécialiste en logistique

Les petites équipes avancent plus vite. La vitesse compte.

 

3 / Visibilité et crédibilité

Une mission de recherche privée de 30 jours — avec une transparence des coûts en temps réel, accessible au public — afin d’étudier des modèles fonctionnels:

  • Japon
  • Suisse
  • Islande
  • Luxembourg
  • Monaco

Il ne s’agit pas de copier — mais de comprendre ce qui réduit les frictions dans différents contextes et sociétés, puis d’utiliser ces enseignements pour identifier ce qui est applicable chez nous.

 

4 / Ce que le quasi-zéro exige réellement

Un pôle centralisé d’action rapide coordonnant trois groupes :

  • Groupe 1 : Logement, éducation, formation professionnelle, langues, littératie numérique
  • Groupe 2 : Services de santé et spécialistes en dépendance
  • Groupe 3 : Identification, services juridiques, fiscaux et gouvernementaux

Un seul lieu.
Un seul endroit capable de résoudre les problèmes en temps réel.

 

5 / Livrable

Un rapport public et concret remis au maire, présentant une feuille de route claire permettant à Montréal d’atteindre une itinérance quasi nulle — incluant les échéanciers, les coûts et des résultats mesurables.

 

Dernière étape

Bâtir un cadre évolutif avec une zone de test à Montréal.

Mesurer. Partager. Améliorer. Créer de l’élan.
Faire de cet enjeu un défi sociétal partagé — et une vitrine internationale démontrant que c’est possible.

  • La compassion sans exécution échoue à ceux qu’elle cherche à aider.
  • L’exécution sans compassion ne dure pas.

Nous avons besoin des deux — conçus ensemble.

— Joe

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